Des échauffourées ont éclaté entre les populations d adjamé village et la police nationale ce vendredi 7 septembre 2018, suite à une opération de déguerpissement, dans le cadre de la construction du futur 4è pont d’Abidjan.
Les rues d’Adjamé village étaient envahies par une épaisse fumée due aux gaz lacrymogènes utilisés par la police pour disperser la foule qui commençait à se réunir pour effectuer une marche de protestation. En effet, d’après les informations reçues le site aurait été dédommagé depuis belle lurette. Ce qui n’est de l’avis de la chefferie qui clame haut et fort qu’ils n’ont rien perçu : « Cessez de nous embêter personne n’a dédommagé quelqu’un. Un Etat laisse toujours des traces pour l’argent qu’il décaisse.
Le président peut faire une faveur à quelqu’un, il peut ne pas avoir de trace. Mais dédommager un peuple pour une telle chose, nous n’avons rien reçu, nos parents n’ont rien reçu. Je le dis très fort parce que je suis né avant qu’Abidjan ne soit développé, et je sais de quoi je parle. Alors cessez cette histoire », a martelé le chef tapant du poing sur la table.
Aussi, a-t-il ajouté : « Posez la question à l’État combien a-t-il dédommagé et à qui ils ont donné cet argent. Puisque nous qui sommes héritiers, nous ne savons rien. Nous avons demandé à aller aux deux Plateaux parce que nous étions condensés, et c’est une extension. Nous avons demandé à l’État de nous permettre de nous étendre parce que nous sommes étouffés ».
« Cessez de raconter vos ragots. Ne nous fatiguez pas, nous vous avons tout donné, nous vous hébergeons et vous voulez nous marcher dessus »
Par ailleurs, il a évoqué la reconnaissance du peuple Ebrié qui a donné gît et logis qui cependant, ne lui ai pas bien rendu : « Cessez de raconter vos ragots. Ne nous fatiguez pas, nous vous avons tout donné, nous vous hébergeons et vous voulez nous marcher dessus. Ne pouvons-nous pas vivre tranquilles ? Nous ne souhaiterions plus jamais entendre vous les Ebriés, nous vous avons dédommagés », a-t-il dit.
Lagune et forêt
En outre, il a évoqué le problème de lagune et de forêt qui auparavant était leur gagne pain devenu un vil objet dont ils ne plus rien tirer comme profit. « La lagune qui est là était notre économie, elle était notre activité, nous étions des planteurs pêcheurs. Pouvons-nous pêcher aujourd’hui ? Nous n’avons plus de forêt où allons planter le manioc ? », a-t-il demandé.
Et de lancer tout furieux : « Nous souffrons, si vous ne voulez as nous aider, ne nous aidez pas. Mais de grâce, ne prêchez pas le faux. Vous dites à l’opinion nationale et internationale que le Ebriés ont été dédommagés. Prouvez-le nous ! puisque nous n’avons rien vu, nos parents ne nous ont rien dit. Savez-vous comment la plantation là où il y a le cimetière de williamsville a été prise ? On donnait 10 francs CFA par arbre fruitier ».
Prince Beganssou
J’ai suivi avec beaucoup d’attention les évènements d’Adjamé village et je suis profondément indignée de la brutalité avec laquelle l’État incarné par M. Ouattara entend déguerpir ces populations.
L’État, il est clair a des impératifs de développement et celui-ci ne peut se faire sans quelques sacrifices quelques fois. Cependant, le développement en question est censé profiter aux populations et c’est pourquoi lorsqu’il croise les intérêts d’une partie de la population, des discussions doivent être engagées afin de trouver la meilleure solution possible.
En France, pays qui nous sert de référence à la fois politique, juridique et morale, les populations pendant des années ont bloqué le site de la construction de l’aéroport Notre Dame des Landes. Tous les gouvernements qu’ils soient de gauche ou de droite qui se sont succédé ont donné la priorité au dialogue. En dépit du fait que cet aéroport allait désenclaver la ville de Nantes et la relier au reste du monde, les manifestants ont opposé des arguments à la fois écologiques et sécuritaires. Le gouvernement sous Macron a décidé d’annuler le projet.
En général, quand on détruit les habitations des populations à Abidjan, on leur demande d’aller au village. Dans le cas des populations d’Adjamé Village, c’est à la fois leur village leur activité économique donc moyen de subsistance qui seront détruit en un coup. La gravité de la situation mérite qu’on lui accorde une attention particulière. On ne peut pas tout résoudre par la violence et la confrontation. Le peuple Ebrié a beaucoup donné à la Côte d’ivoire. Il mérite respect et considération. Ce peuple autrefois composé de pêcheurs et d’agriculteurs a vu toute son activité économique être détruite par le besoin de construction ou d’extension de notre capitale. Et même si l’on estime qu’ils sont en torts, ce qui reste à prouver, il faut dialoguer. Mais on ne peut pas frapper ces pauvres populations parce qu’on a passé le marché à ses amis et que ceux-ci ont besoin de construire rapidement pour empocher l’argent. Un pays ne se gère pas comme une entreprise.
Au total, 6 967 bâtisses qui sont potentiellement affectés par le projet, sont réparties comme suit : 4119 dans la commune de Yopougon, 1901 dans la commune d’Attécoubé et 947 bâtisses dans la commune d’Adjamé. Va-t-on frapper toutes ces populations à travers la capitale ? Officiellement, il s’agit de construire un pont mais sous ce projet louable, ce sont plusieurs intérêts de certains particuliers entre surfacturations et faux en écritures qui se déroulent. Vous êtes pressés d’encaisser votre argent, c’est vrai mais n’humiliez pas les ivoiriens. Nous aspirons à la paix et la cohésion sociale.
M. Ouattara, vous créez les germes d’un conflit social. Les populations ne refusent pas le développement. Elles exigent d’être dédommagées à la hauteur du préjudice qu’elles vont subir. À défaut, faites dévier le pont.
KYRIA DOUKOURE