Il était le grand absent de la rentrée parlementaire. Guillaume Soro boycotte Alassane Ouattara, alors que son successeur Amadou Soumahoro faisait sa première sortie officielle ce lundi 1er avril 2019.
Le Président Alassane Ouattara a pris part, ce lundi 1er avril 2019, à la cérémonie solennelle d’ouverture de la session ordinaire 2019 de l’Assemblée nationale. Les députés au grand complet étaient présents. De Pascal Affi N’Guessan (FPI), à Maurice Kakou Guikahué (PDCI), en passant par Sess Soukou (pro-Soro). Une absence remarquable toutefois : celle de Guillaumé Soro, occupé à sa pré-campagne dans le septentrion ivoirien.
Depuis samedi, l’ex-président de l’Assemblée nationale visite hameaux et villages du Nord ivoirien et assène ses coups. « Eux, ils ont choisi le bon moment pour aimer Alassane. Mais nous qui sommes loyaux fidèles, nous qui nous sommes engagés par conviction, nous, on a choisi Alassane au moment où il ne savait même pas qu’il pouvait être député en Côte d’Ivoire. C’est à ce moment que nous, on l’a soutenu. Nous n’avons pas attendu qu’il devienne Président pour courir maintenant oui monsieur le président, oui monsieur le Président », a-t-il attaqué les « laudateurs » du RHDP, à Boniérédougou.
Pour sa part, le Chef de l’Etat a adressé ses vives félicitations à Amadou Soumahoro élu début mars, après la démission forcée de Soro. Il a réitéré « la volonté du gouvernement d’œuvrer à l’amélioration des conditions de vie et de travail des Ivoiriens à travers la mise en œuvre du Programme social du gouvernement » et a lancé un appel à « la paix, à la cohésion sociale et au rassemblement pour bâtir une Nation moderne, modèle et prospère ».
Le discours intégral du Président Alassane Ouattara devant les députés
Le Président de la République Alassane Ouattara a pris part ce lundi 1er avril 2019, à la session ordinaire 2019 de l’Assemblée nationale. Ci-dessous l’intégralité de son adresse à la nation.
C’est avec beaucoup de plaisir que je me retrouve avec vous, les Représentants du Peuple de Côte d’Ivoire, et à travers vous, la Nation Ivoirienne dans toute sa diversité.
Ma présence parmi vous, à l’occasion de l’ouverture de la Session ordinaire de l’année 2019 de l’Assemblée Nationale, est la preuve éloquente de l’importance que j’accorde à l’action du Parlement.
Honorables Députés,
Chers frères et soeurs,
Votre contribution est très importante, car le Peuple de Côte d’Ivoire attend beaucoup de cette prestigieuse Institution. Je voudrais donc vous féliciter au nom de la Nation pour les actions menées en faveur de tous nos concitoyens.
Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale, cher frère,
Honorables Députés,
Je voudrais saluer la présence à cette Session ordinaire des Députés de l’Assemblée Nationale française ainsi que celle du Secrétaire Général de l’Assemblée Nationale du Gabon.
Je voudrais également profiter de ma présence en ce lieu, pour féliciter chacune et chacun de vous pour votre élection en qualité de Député à l’Assemblée Nationale lors des élections législatives du 16 décembre 2016.
Je félicite tout particulièrement mon jeune frère, le Président Amadou Soumahoro, sur qui vous avez porté votre choix pour diriger cette prestigieuse Institution.
Le Président Amadou Soumahoro est un homme de grande expérience. Un homme engagé, compétent, honnête, courageux et loyal. Je suis convaincu, au regard de ses qualités personnelles et professionnelles et de sa riche expérience politique et parlementaire, qu’il apportera beaucoup à l’Assemblée Nationale et qu’il saura mériter votre confiance.
Mes chers compatriotes,
Comme je l’ai indiqué à maintes reprises, la mise en place d’Institutions fortes et crédibles me parait essentielle.
A ce titre, l’année 2016, qui a vu l’adoption de la Constitution de la IIIème République, avec le renouvellement de l’Assemblée Nationale et la mise en place du Sénat, a été une année importante pour le renforcement de nos Institutions et la consolidation des avancées démocratiques dans notre pays.
Nous devons poursuivre les efforts entrepris par une collaboration encore plus accrue entre l’Exécutif et le Législatif.
Mesdames et Messieurs,
Honorables Députés,
En application des dispositions de la Constitution de 2016, qui stipule en son article 115 que : « Le Président de la République communique avec l’Assemblée Nationale et le Sénat, soit directement soit par des messages qu’il fait lire par le vice-Président de la République dans chacune des chambres du Parlement », j’ai décidé de m’adresser à vous ce matin. En effet, vous portez les aspirations et les attentes du Peuple de Côte d’Ivoire dans son entièreté.
Et au-delà de son rôle en matière législative et de contrôle de l’action gouvernementale, votre Institution est le creuset de tous les courants d’idées et de toutes les sensibilités, dont l’expression traduit la Volonté de l’ensemble de nos compatriotes.
Elle est également l’Institution à laquelle le Chef de l’Etat peut s’adresser pour faire l’état de la Nation et partager les défis à relever.
Honorables Députés,
Mesdames et Messieurs,
Le bilan de l’action gouvernementale, au cours de ces dernières années, a montré des avancées significatives, qui contribuent au rayonnement de notre Nation.
Des progrès ont également été enregistrés aux plans économique et social ainsi qu’en matière de réformes structurelles et de développement des infrastructures. Je voudrais donc féliciter le Premier Ministre, Amadou Gon COULIBALY et son Gouvernement pour l’importante tâche qu’ils accomplissent au quotidien.
A présent, nous avons décidé de mettre un accent particulier sur le social, avec la mise en oeuvre du Programme Social du Gouvernement sur la période 2019 – 2020.
Ce programme d’un montant de 727,5 milliards de FCFA, couvrira les secteurs sociaux prioritaires de la santé, de l’éducation, de l’électricité, de l’eau potable, de l’autonomisation des jeunes et des femmes, des logements sociaux…
Je voudrais profiter de l’occasion de la rentrée solennelle de votre Institution pour vous assurer de ma ferme détermination à continuer d’améliorer les conditions de vie de nos concitoyens.
Honorables Députés,
Mesdames, Messieurs,
Je suis également engagé à rassembler toutes les filles et tous les fils de notre beau pays ; car, il ne peut y avoir de développement durable sans paix durable et sans sécurité. A cet égard, je me félicite de l’amélioration de l’indice de sécurité de notre pays qui est à 1.1, soit son plus faible niveau depuis la crise. C’est le même niveau d’indice observé dans toutes les grandes capitales du monde. Je voudrais donc féliciter les Ministres de la Défense et de la Sécurité ainsi que les Officiers Généraux et Supérieurs, ici présents.
La réconciliation et la cohésion sociale ont toujours figuré au rang de mes priorités. Il s’agit d’un engagement de chaque instant que nous devons mener ensemble. C’est pourquoi, je voudrais en appeler à la responsabilité de chacun afin de préserver la paix et la cohésion.
Nous devons tous tenir un discours apaisé car nos compatriotes, dans leur grande majorité, aspirent à vivre et à travailler ensemble, dans la paix et la sécurité, pour bâtir notre Nation. Notre Nation est jeune; elle est fragile. Nous en avons fait l’expérience au cours de ces deux dernières décennies.
Pour ma part, j’ai démontré mon engagement en faveur de la réconciliation et je suis heureux de constater que cette réconciliation nationale est bel et bien en marche.
L’amnistie accordée à plusieurs de nos compatriotes, dont l’ex-Première Dame, Simone Ehivet Gbagbo ou encore Messieurs Lida Kouassi et Assoa Adou ainsi que ma décision de ne plus envoyer d’Ivoiriens à la Cour Pénale Internationale (CPI), s’inscrivent dans cette voie.
De même, je me félicite des décisions prises auparavant par la justice, qui ont permis la mise en liberté de nombreux de nos compatriotes poursuivis ou condamnés pour des infractions en lien avec la crise postélectorale de 2010, ou des infractions contre la sureté de l’Etat commises après le 21 mai 2011, date de mon investiture officielle.
L’indemnisation, en cours, des victimes des différentes crises que notre pays a traversées s’inscrit dans la même perspective de réconciliation et du Pardon.
L’indemnisation des victimes doit continuer de demeurer une priorité, car pour bon nombre de nos concitoyens, ces crises furent des moments difficiles, pénibles et choquants. S’il n’y a pas d’indemnisation des victimes, il ne peut y avoir de réconciliation.
L’Etat continuera d’apporter le réconfort et la solidarité de la Nation aux victimes et à leurs familles. Dans ce cadre, des mesures additionnelles ont été prises au plan matériel et financier en vue de soutenir davantage toutes les victimes, sans exception.
Par ailleurs, j’ai instruit le Premier Ministre, à l’effet de rencontrer les responsables des Partis politiques et de la Société civile en vue de réexaminer la composition de la Commission Electorale Indépendante, comme je l’avais promis, conformément aux recommandations de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.
A l’issue de ce Dialogue Politique entamé début janvier 2019, je déposerai devant votre Institution un projet de loi relatif à la Commission Electorale Indépendante, prenant en compte les propositions qui renforcent la confiance dans cette importante Institution.
Il importe donc que vos débats et vos délibérations fassent progresser la démocratie dans notre pays afin de renforcer la confiance des Ivoiriens dans nos Institutions.
Honorables Députés,
Mesdames, Messieurs,
Pour tenir compte de l’évolution de notre société, nous continuerons de renforcer le rôle et la place des femmes et des jeunes.
Au cours de ces dernières années, nous avons ainsi mis en place les mécanismes qui favorisent les activités des jeunes et des femmes. Les résultats sont très encourageants et nous poursuivrons nos actions.
Nous savons que les droits reconnus aux femmes, par nos textes, ne suffisent pas. Ces textes leur seront réellement bénéfiques si nous mettons en place des mesures permettant d’accroître leur autonomie financière. Pour cela, il faut de la volonté, des financements et des mécanismes. C’est ce à quoi nous nous attelons, en particulier avec le FAFCI (Fonds d’Appui aux femmes de Côte d’Ivoire).
Par ailleurs, la récente adoption d’un projet de loi en Conseil des Ministres, pour favoriser la représentation des femmes dans les Assemblées élues va imposer un quota minimum de 30% de femmes sur le nombre total de candidats présentés aux scrutins. Je souhaite que vous puissiez nous accompagner dans cette volonté de modernisation de la vie politique dans notre pays.
De plus, très prochainement, vous serez également saisis d’un ensemble de projets de Lois, qui renforcent les Droits des Femmes et des Mineurs.
Il s’agit des projets de Lois sur le Mariage, la Minorité, la Succession et la Filiation. Nos textes en vigueur présentement sur ces questions datent de plus d’un demi- siècle, précisément de 1964. Ceci n’est pas acceptable pour un pays moderne comme la Côte d’Ivoire. Je vous enverrai donc ces projets de Lois et je souhaite que vous puissiez les adopter pour montrer que notre Assemblée Nationale est en phase avec l’évolution moderne de notre beau pays.
Des projets de Lois adoptés dans le cadre du renforcement de l’action sociale du Gouvernement vous seront également soumis. Il s’agit notamment du projet de Loi portant réforme hospitalière et du projet de Loi instituant un Code de la construction et de l’Habitat.
A cet égard, je voudrais vous féliciter pour le soutien que vous apportez aux actions du Gouvernement par l’adoption des projets de Loi et la ratification des ordonnances dans les délais constitutionnels.
Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale, cher frère,
Honorables Députés,
Je ne saurais terminer mon propos sans apporter une réponse à l’une de vos préoccupations, qui m’a été transmise par le Président Amadou Soumahoro, à savoir l’élaboration de la loi organique relative au statut des Députés.
J’ai demandé au Premier Ministre, Chef du Gouvernement qui est en même temps Ministre du Budget, et au Ministre auprès du Président de la République, chargé des Relations avec les Institutions de la République, de travailler avec le Président de l’Assemblée Nationale afin de nous faire des propositions, en tenant compte des capacités de l’Etat et de la pratique au sein de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine. Je suis bien placé pour savoir que dans d’autres pays, les Députés sont mieux traités qu’en Côte d’Ivoire. Vous pouvez donc compter sur moi pour un examen pragmatique de cette question!
Honorables Députés,
Mes chers compatriotes,
Au moment où la Côte d’Ivoire s’apprête à aborder un nouveau cycle par l’élection présidentielle de 2020, je souhaite vivement l’union de tous pour faire face, dans la confiance et la sérénité, à cette importante échéance. Je suis convaincu que tout se passera dans une bonne ambiance, comme cela a été le cas en 2015. Arrêtons donc de nous faire peur les uns les autres. La Côte d’Ivoire est en paix ; elle demeurera en paix et organisera des élections démocratiques en 2020, pour poursuivre son chemin vers la paix, le progrès et la modernité.
Pour terminer, je voudrais en appeler à l’union de tous autour des valeurs de paix, de dialogue et de fraternité si chères au père de la Nation Ivoirienne, le Président Félix Houphouët-Boigny.
Nous devons mettre l’intérêt de notre chère Côte d’Ivoire au-dessus de nos intérêts individuels.
Pour ma part, je continuerai de maintenir le cap du développement de notre pays et du bien-être de nos concitoyens.
Je sais pouvoir compter sur le soutien des Honorables élus que vous êtes.
Vive la République,
Vive la Côte d’Ivoire,
Que Dieu bénisse notre beau pays et chacun de nous.
Je vous remercie.
Elvire Ahonon