L’ONG nantaise Eau et Vie, qui intervient dans un bidonville d’Abidjan, a fait un geste envers les habitants, souvent privés de tout revenu par les mesures de lutte contre l’épidémie de Covid-19. Elle a réduit de moitié le prix de l’eau.
Edwige, 20 ans, enfile sa perruque rouge, sa belle robe à motifs et sort de chez elle pour un achat un peu particulier. « Je n’ai pas l’eau courante donc tous les matins, je viens faire la queue pour remplir mes deux bassines« , explique cette coiffeuse au chômage à cause des mesures restrictives adoptées par le gouvernement pour empêcher la propagation du coronavirus.
À Gbamnan Djidan 1, un quartier populaire d’Abidjan, deux points de revente permettent aux habitants qui n’ont pas de robinet chez eux de s’approvisionner légalement. Ce mois-ci, les 150 litres coûtent 7 centimes d’euro, moitié moins que d’ordinaire.
L’eau à tarif réduit
Alors qu’au moins 5 millions de personnes n’ont pas accès à l’eau, soit un cinquième de la population de la Côte d’Ivoire, ce bidonville fait figure d’exception parmi les banlieues pauvres. C’est l’ONG Eau et Vie qui a mis en place ce tarif réduit. Implantée dans ce quartier de 2 100 habitants depuis trois ans, l’association nantaise a installé l’eau dans une centaine de foyers. En cette période difficile, la structure se charge de régler la facture du mois d’avril pour ses 7 600 abonnés dotés d’un robinet aux Philippines, au Bangladesh et à Abidjan.
Un soulagement pour les familles précaires de ce quartier ivoirien, où « les gens vivent au jour le jour de petites activités« , explique Sidiki Coulibaly, agent communautaire d’Eau et Vie. Pour empêcher la propagation du coronavirus — au 8 avril, la Côte d’Ivoire comptait 384 cas et trois décès — le gouvernement a fermé écoles, restaurants, lieux de culte et imposé un couvre-feu. Alors le travail s’est raréfié et pour ceux qui n’ont pas de salaire fixe, « c’est difficile de s’en sortir et d’avoir de quoi payer les factures« , poursuit Sidiki Coulibaly.
Un Ivoirien sur deux sous le seuil de pauvreté
Pour Ibrahima, qui dispose d’un robinet à la maison, l’économie sur le mois sera d’environ cinq euros. Une somme non négligeable puisque la quasi-totalité des revenus de son frère, chez qui l’étudiant vit, s’est évanouie. Près d’un Ivoirien sur deux vit sous le seuil de pauvreté.
Un peu plus loin, Odilon, 35 ans, vient remplir deux bidons de 20 litres au point de revente. C’est tout ce qu’il peut s’offrir aujourd’hui. Son activité de peintre en bâtiment à l’arrêt, Odilon est affligé : « Je viens de finir mon sac de riz. Je ne sais pas comment je vais faire pour nourrir mes deux enfants ».
Pour Edwige cependant, les règles d’hygiène ne doivent pas pâtir de la baisse des revenus : « Je me lave les mains avec du savon plusieurs fois par jour« . Eau et Vie a affiché les gestes barrières sur des bâches et envoie des messages de sensibilisation sur WhatsApp, que les personnes modèles du quartier doivent restituer aux habitants.
Mardi 31 mars, le gouvernement ivoirien a annoncé un plan économique et social de 2,6 milliards d’euros. Les plus vulnérables bénéficieront d’un fonds de solidarité et de la prise en charge de leurs factures d’eau et d’électricité.