TRADUCTION
En langage simple, cela signifie que l’une des décisions à savoir le report à 2020 du congrès statutaire, et le prolongement du mandat de Bédié et des instances, n’est plus valable.
À partir du 6 octobre 2018, le Président Bédié ne peut plus diriger le Pdci Rda, selon la justice. Le parti devra mettre en place, les mécanismes de transition, ou organiser un congrès dans les délais requis.
Bédié n’a pas dit son dernier mot. Un appel de l’arrêt obligerait à jouer la prolongation. Mais attendons de voir ce qui sortira de Daoukro dans quelques heures.]
Nouvel épisode dans la crise qui secoue le PDCI sur la question du ralliement au RHDP, le parti unifié. Une décision de justice a invalidé le 19 septembre la décision du bureau politique du parti avalisant le report de l’alliance avec la coalition présidentielle à après la présidentielle de 2020.
Au siège du PDCI, dans la soirée du mercredi 19 septembre, la colère se lisait sur les visages des militants accourus dès l’annonce de la décision du tribunal du Plateau. « Nous avons vu pire que cela. D’abord avec les militaires, suite au coup d’État de 1999, puis lors de la crise militaro-politique. Le PDCI vivra ! », lance l’une d’elle. Dans les bureaux, les cadres du parti s’affairent à préparer le prochain bureau politique du parti tandis qu’à Daoukro, Henri Konan Bédié, 84 ans, président du parti depuis vingt-quatre ans, prépare sa riposte.
Plus tôt dans la journée, une décision de justice a enfoncé un nouveau coin dans les relations déjà tendues au sein du PDCI entre les partisans de l’alliance avec le RHDP, parti unifié, et ceux qui s’y opposent, au premier rang desquels Henri Konan Bédié.
LE VÉRITABLE ENJEU DE CETTE BATAILLE JURIDIQUE EST LE CONGRÈS ORDINAIRE DU PDCI
Décision suspendue
La juge Massafola Méité-Traoré du tribunal de première instance du Plateau (Abidjan) a suspendu la décision prise par le bureau politique du PDCI le 17 juin 2018. Ce jour-là, le PDCI avait « endossé l’accord politique signé le 12 avril 2018 par les partis membres du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP, mouvance présidentielle) » en vue de la création d’un futur parti unifié.
Mais les instances dirigeantes du parti avaient surtout soumis l’adoption des textes fondateurs de ce futur parti unifié « à l’examen du prochain congrès ordinaire du PDCI », dont la date a été repoussée à après l’élection de 2020.
Derrière ces questions d’agenda, les décisions du bureau politique du 17 juin dernier marquent en fait le premier pas du PDCI vers la rupture avec la coalition au pouvoir, officialisée début août par Henri Konan Bédié.
Autres décisions « suspendues » par la justice ivoirienne : le report de la date du congrès ordinaire du PDCI et, surtout, la prolongation du mandat de Henri Konan Bédié à la tête du parti au-delà du 6 octobre.
« Le véritable enjeu de cette bataille juridique est le congrès ordinaire du PDCI », explique l’analyste politique Innocent Gnelbin, précisant que « le 6 octobre prochain, Bédié aura bouclé son mandat de cinq ans à la tête du PDCI. Et la justice pourrait à nouveau être mise à contribution par ses adversaires au sein du parti, dès lors qu’il apparaît certain qu’il ne pourra pas organiser de congrès avant cette échéance ».
Réunion délocalisée
En saisissant le tribunal, Jérôme N’Guessan, membre du bureau politique du PDCI, et partisan de l’intégration du parti au RHDP, souhaitait une annulation pure et simple de la résolution du 17 juin, afin que seule demeure la validation par Bédié de l’accord politique signé deux mois plus tôt. Jérôme N’Guessan peut même savourer une double victoire, le tribunal ayant également suspendu une décision du bureau politique qui le visait.
Mais la décision de justice est loin de mettre un point final au débat qui divise le PDCI. Et Henri Konan Bédié, bien décidé à riposter, s’était préparé à l’éventualité avec une application redoublée depuis que la Commission électorale indépendante (CEI) l’a débouté, début septembre, de sa demande d’interdire aux militants PDCI ayant rejoint le RHDP d’user du logo du parti.
LE RENDEZ-VOUS A ÉTÉ PRIS À DAOUKRO, ALORS QU’HABITUELLEMENT LES BUREAUX POLITIQUES DU PDCI SE TIENNENT À SON SIÈGE À COCODY
À la veille de l’ordonnance attendue de la juge, mardi 18 septembre, Bédié a reçu la majorité des membres de son secrétariat exécutif dans son fief de Daoukro. À l’issue de la rencontre, il avait été décidé de convoquer un bureau politique, mais aucune date n’avait été fixée… Dès la décision de justice connue, rendez-vous a été pris au lundi 24 septembre à Daoukro. Un choix qui n’a rien d’anodin, alors qu’habituellement les bureaux politiques du PDCI se tiennent à son siège à Cocody, à Abidjan.
IL N’EST PAS EXCLU QUE LE PROCHAIN BUREAU POLITIQUE DU PDCI DÉCIDE DE QUITTER DÉFINITIVEMENT L’ALLIANCE DU RHDP
En délocalisant cette réunion dans un hôtel non loin de son domicile, à plus de 230 km au nord d’Abidjan, le notable baoulé avait peut-être en tête la citation de l’écrivain malien Massa Makan Diabaté : « Les pieds ne vont pas là où le cœur n’est pas ». Tout en prenant soin de maîtriser la sécurité, pour éviter les incidents qui ont éclaté lors du bureau politique du 17 juin, Bédié veut aussi s’assurer que ceux qui feront le déplacement seront principalement ses inconditionnels.
Vers une rupture définitive ?
Et ce bureau politique pourrait fort bien déboucher sur des décisions encore plus tranchées que celles qui ont été « suspendues » par la justice. « Il n’est pas exclu que le prochain bureau politique du PDCI décide de quitter définitivement l’alliance du RHDP, alors que celui qui a été attaqué en justice laissait entrevoir la possibilité d’une adhésion du PDCI », commente le politologue Innocent Gnelbin. « De même, le PDCI pourrait décider de suspendre sa participation au processus électoral et d’en appeler à une large coalition de l’opposition contre le Rassemblement des républicains (RDR) d’Alassane Ouattara », continue-t-il.
En attendant, les avocats du PDCI affûtent leurs arguments pour interjeter appel de la décision prise en première instance, et s’emploient à s’entourer de toutes les garanties juridiques pour sécuriser les décisions qui seront prises lors de la prochaine réunion.
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