Des personnes sont émotives face aux sorties à doses de « révélations » du général Mangou avant d’avoir mené des réflexions profondes. Pourtant l’ex-chef d’état-major clame haut et fort avoir sauté du navire du Président Gbagbo avant même que les troupes ennemies ne le capture. Pis, il déclare de sa propre bouche, de façon consciente ou inconsciente à qui ne le saurait pas, que sa présence à la CPI auprès de l’Accusation, que de se retrouver dans le box des accusés auprès de Président Laurent Gbagbo et du ministre Charles Blé Goudé, vise à les enfoncer et les maintenir en prison (ce sont mes propres termes), en qualité de témoin à charge. Eh oui !! Le général Philippe Mangou, ex-chef d’état-major du Président Laurent Gbagbo, l’homme qui lui avait dédié des louanges, chanté à sa gloire, reconnu que c’est lui qui a été déclaré élu par les Institutions de la Côte d’Ivoire fin 2010 et début 2011, galvanisé les jeunes et adoubé leur enrôlement urgent dans l’armée pour les convoyer sur les lignes de front (il en a fait lui-même le décompte de façon exhaustive) est un témoin à charge.
De cette période jusqu’à son témoignage à la CPI, fixant Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé, droit dans les yeux et répétant avec assurance que c’est parce qu’il a demandé la démission de l’ex-chef d’Etat ivoirien qu’« ils ont voulu le tuer » en s’attaquant à sa résidence est révélateur.
Le général Philippe Mangou l’a dit, l’actuel chef de l’Etat Alassane Ouattara a réussi à le joindre dans son exil à l’ambassade Sud-africain. C’est Alassane Ouattara qui lui a non seulement déconseillé l’exil mais qui a proposé mieux : Garder son poste de chef d’état-major en vue d’appeler à cesser les hostilités et à œuvrer pour une armée homogène (Forces nouvelles et Fds). Pour briser davantage cette volonté d’aller en exil, son épouse à qui il voue une admiration certaine (il l’exprime si bien à la face du monde), filleul du Grand médiateur de la République Mathieu Ekra (baron du PDCI-RDA affilié au RHDP dans lequel se trouve également le RDR d’Alassane Ouattara), s’y met avec un rappel de contraintes existentielles en exil : « On va MANGER comment là-bas ?» Vous avez bien lu. MANGER ! Un verbe par lequel Alassane Ouattara tient par le bout du nez – j’allais dire par la profondeur des poches – bon nombre de nos opposants politiques et intellectuels qui passent sous silence ses dérives, entre autres la restriction de la liberté d’expression dans les médias d’état, le maintien en prison d’opposants pour des délits imaginaires, la favorisation de l’insécurité à travers la prolifération de « microbes » qui ôtent la vie à d’honnêtes citoyens… Bref !
Revenons à notre témoin à charge. Après avoir retourné sa veste de façon spectaculaire, le général a été nommé Ambassadeur de plein exercice auprès du « frère de lumière » Ali Bongo (il faut le rappeler bien) pour mieux le cerner, le briefer et le coacher. Et dans l’interprétation de son scénario à lui attribué, l’ex-chef d’état-major oublie que le rôle qu’il joue a aussi impliqué d’autres acteurs et visionné par de nombreux spectateurs. Dans ce nouveau scénario, d’un côté Mangou s’abstient de nommer Guillaume Soro dans son ex-rôle (que lui-même est fier de s’attribuer dans un livre écrit de ses propres doigts), évite de préciser la partition jouée par les forces dites « impartiales » qu’il avait épinglée de façon véhémente à l’époque, disculpe Alassane Ouattara sur la scène du Commando invisible d’Abobo, décline ses responsabilités propres à lui… De l’autre, le fils de pasteur charge.
Ses collaborateurs (certains souffrent le martyr en prison). C’est le président Laurent Gbagbo qui a requis l’armée. Le terme « requis » sous-entend que c’est le président Gbagbo qui répond (directement ou indirectement) de tout ce qu’a fait l’armée à cette époque. Mangou se laisse même aller à un jeu de mot : « Je me dis que si le ministre est informé, c’est que le président aussi est informé ». Mangou fait un rapprochement de fait sans toutefois en donner la preuve matérielle : « Gbagbo a financé accidentellement le commando invisible ». Mangou, là où il s’évertue visiblement à l’époque à disposer d’armes et de munitions pour faire feu sur l’ennemi y compris à Abobo qu’il a bien voulu voir déclarer « zone de guerre », rappelle aujourd’hui que s’il disposait de cette logistique il n’irait point faire de manœuvres militaires.
Le dernier kata révélateur est le rapport fait de ses propres mains au ministre de la Défense qui atterrit sur le bureau du procureur et qu’il est lui-même surpris de retrouver entre les mains de la Défense.
Eh oui !! Mangou est dans son rôle, à pleine vitesse. La Défense y est aussi : Ne pas concéder du crédit aux propos du général de corps d’armée qui a eu son ascension fulgurante (autrefois très critiquée par ses nouveaux amis) de celui de qui il se démarque et charge dans l’antre d’un tribunal appartenant aux puissances coloniales.
Je rappelle, pour conclure, qu’Alassane Ouattara vient de reporter le vaste mouvement des Ambassadeurs qui devait avoir lieu en Septembre dernier. Les yeux tournés certainement vers la CPI.
Ceci explique cela ?
Je n’ai pas l’art divinatoire que Gbagbo aurait dû avoir pour faire un très bon casting de ses collaborateurs. Puisqu’on le lui reproche… moi je dis « à tort ».
A bientôt !!