Pour de nombreux parlementaires, François Fillon est devenu «le candidat de la raison». «L’atterrissage en douceur se poursuit, quelques turbulences mais sans gravité», explique un élu LR embarqué dans la campagne. Parmi ces turbulences, l’annulation de la réunion prévue entre Nicolas Sarkozy, Alain Juppé et le candidat de la droite. «Rien ne justifie aujourd’hui une rencontre à trois», argumente-t-on dans l’entourage du maire de Bordeaux.
La question du «plan B» étant définitivement évacuée, reste toutefois à recoller les morceaux d’une famille politique qui a failli imploser la semaine dernière. C’est ce à quoi se sont attachés, mardi matin, les présidents des groupes LR de l’Assemblée et du Sénat, Christian Jacob et Bruno Retailleau, à quarante-six jours du premier tour de l’élection présidentielle. Les deux coresponsables de la stratégie de campagne de François Fillon ont insisté devant leurs pairs sur la nécessité du rassemblement. «Ceux qui sont partis ne sont pas des pourris et des lâches, et ceux qui sont restés ne sont pas des jusqu’au-boutistes hystériques», a lancé Christian Jacob.
Bruno Le Maire a réuni à midi à l’Assemblée les maires et les parlementaires qui l’avaient soutenu à la primaire. Il a défendu sa décision de se retirer de la campagne: «Je l’ai prise avec mes tripes, sans calcul. C’est un vrai déchirement, mais je suis en accord avec ma conscience. Ma ligne rouge, c’était le respect de la parole donnée.» Il leur a aussi précisé que soutenir ou pas Fillon relevait de la liberté individuelle de chacun.
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Les sarkozystes se sont également réunis et la discussion a été animée. «Moi, je vous le dis, c’est perdu», a lâché Georges Fenech, qui a accusé l’ancien premier ministre d’avoir «pris en otage» les élus. «On va droit dans le mur», a renchéri Nadine Morano.
Les proches du maire de Bordeaux se sont vus aussi. Ils ont salué «la décision d’homme d’État d’Alain Juppé». «Les juppéistes restent loyaux à leur famille politique. La priorité aujourd’hui est de permettre à nos idées de l’emporter», a assuré Jean-Pierre Raffarin. Le sénateur de la Vienne a ensuite été reçu par François Fillon, qui envisage de lui confier les affaires européennes et internationales, dont s’occupait pour Bruno Le Maire.
Avant de se rendre à Orléans, le soir, le candidat a enchaîné les rendez-vous. Après Jean-Pierre Raffarin, il a poursuivi avec les sarkozystes Brice Hortefeux et Christian Jacob. Pour tourner la page de la fronde contre sa candidature, le député de Paris a décidé d’élargir son équipe. Il compte s’appuyer en particulier sur Laurent Wauquiez pour impliquer davantage le parti dans la campagne. Bernard Accoyer reste secrétaire général en titre, mais le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes espère bien prendre la tête de LR en cas de victoire.
François Fillon recevra aussi mercredi Jean-Frédéric Poisson, le président du Parti chrétien-démocrate, qui avait refusé de s’associer à la manifestation du Trocadéro. L’élu des Yvelines espère une redistribution des cartes, avec à la clé des investitures supplémentaires aux législatives pour ses troupes.
De son côté, l’UDI a réuni son bureau exécutif en début de soirée. La semaine dernière son président Jean-Christophe Lagarde avait retiré son soutien à François Fillon et souhaité qu’Alain Juppé soit candidat. Mardi, les dirigeants centristes ont adopté une motion en trois points: ils acceptent les circonscriptions que Les Républicains leur offraient pour les législatives, ils sont d’accord pour ratifier le projet auxquels ils ont travaillé avec la droite, mais ils ne soutiendront pas le candidat LR tant que celui-ci n’aura pas fait un geste dans leur direction. À Orléans, Fillon a dit qu’il manifesterait son désir de réconciliation «Nous sommes en attente de ces initiatives annoncées», ont répondu les centristes, qui n’ont pas digéré que Charles Beigbeder, soutien du candidat LR se réjouisse publiquement de leur départ. Après cette semaine mouvementée, Lagarde a aussi jugé nécessaire de rajouter à la motion soumise au bureau exécutif un paragraphe exprimant le soutien de l’UDI à son président. Seul un dirigeant centriste s’est abstenu de le voter.
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