Le pape François a, lundi, « imploré le pardon de Dieu » pour les « péchés et les manquements de l’Église et de ses membres » durant le génocide rwandais en 1994, mais n’a pas évoqué la responsabilité du Vatican, pourtant réclamée par Kigali.
Le pape François a imploré « le pardon de Dieu » pour « les péchés et manquements de l’Église et ses membres » durant le génocide de 1994 au Rwanda, lundi 20 mars. Il recevait pour la première fois au Vatican le président rwandais Paul Kagame durant une vingtaine de minutes d’échanges « cordiaux », plaçant toutefois le pardon dans la continuité de la repentance générale prononcée par Jean Paul II en 2000, sans impliquer de responsabilité directe du Vatican.
En novembre, le gouvernement rwandais avait estimé que le Vatican devait demander pardon pour le rôle de certains représentants de l’Église dans le génocide qui, selon l’ONU, a fait 800 000 morts, essentiellement parmi la minorité tutsie. Selon un communiqué du Vatican, le pape a exprimé « sa profonde tristesse, et celle du Saint-Siège et de l’Église, pour le génocide perpétré contre les Tutsis » ainsi que « sa solidarité avec les victimes et ceux qui continuent à souffrir des conséquences de ces événements tragiques ».
Certains des massacres ont eu lieu dans des églises où les victimes s’étaient réfugiées pour tenter d’échapper aux miliciens. Le pape « a de nouveau imploré le pardon de Dieu pour les péchés et les manquements de l’Église et ses membres, dont des prêtres, et des hommes et des femmes religieux qui ont succombé à la haine et à la violence, trahissant leur propre mission évangélique », ajoute le communiqué.
Le 21 novembre dernier, les neuf évêques rwandais avaient écrit une lettre demandant pardon pour tous les chrétiens ayant été impliqués dans le génocide. La lettre précisait néanmoins qu’il s’agissait d’une demande de pardon pour des individus et non pour l’institution. Kigali avait alors qualifié ces excuses de « profondément inadéquates » et estimé que le Vatican lui-même devrait demander pardon, « au vu de l’échelle à laquelle ces crimes ont été commis ». Lundi, le pape a indiqué parler en phase avec la lettre des évêques rwandais, espérant que « son humble reconnaissance des manquements de cette période, qui ont malheureusement défiguré l’Église, puisse contribuer à une ‘purification de la mémoire' ».
Lecture historique accusatoire
« Le président a loué les contributions de l’Église au développement socio-économique du Rwanda », a précisé la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo, avant toutefois de livrer une lecture historique très accusatoire : « Bien avant 1994, les institutions et les missions catholiques, ainsi que l’administration coloniale [belge], ont joué un rôle décisif pour diviser les Rwandais, en établissant les fondements intellectuels pour l’idéologie génocidaire », a-t-elle expliqué. « Aujourd’hui, le déni du génocide et sa minimisation continuent à prospérer dans certains cercles de l’Église et les personnes soupçonnées de génocide ont été protégées de la justice au sein de leurs institutions catholiques ».
Avec Reuters et AFP