L’Enquête du jeudi : Qu’en est-il de l’accès aux différents fonds mis en place, au profit des acteurs économiques ?

HomeAfriqueAfrique de l ouest

L’Enquête du jeudi : Qu’en est-il de l’accès aux différents fonds mis en place, au profit des acteurs économiques ?

Depuis le mois de mars, la Côte d’Ivoire fait face à la pandémie du coronavirus. Le gouvernement, sur instruction du Président de la République, Alassane Ouattara a mis en place un plan de riposte économique, social et humanitaire d’un montant total de 1.700 milliards f CFA.  Pour  entre autres nécessités, soutenir les différentes entreprises impactées par la covid-19,   mais également préparer l’après pandémie.C’est ainsi que le Premier ministre, Amadou Gon Coulibaly va créer quatre fonds de soutien, en vue d’assister les entreprises dans ces moments de difficultés. 

Ces fonds gérés par le ministère de l’Economie et des Finances, sous la supervision d’un cabinet international d’experts, sont dotés de 100 milliards de Fcfa pour les Grandes Entreprises, 150 milliards de Fcfa pour les Petites et Moyennes Entreprises (PME), 100 milliards de Fcfa pour les acteurs du secteur informel et 170 milliards comme  soutien d’urgence humanitaire.  A ce jour, qu’en est -il de l’accès à ces différents fonds par ceux qui en ont le droit ? C’est bien ce que nous avons voulu savoir, en approchant des organisations corporatives, des sociétés et autres structures concernées.

Pour le compte des entreprises, le  président de la chambre de commerce et d’industrie de Côte d’Ivoire (CCI-CI), Fama Touré  a bien voulu nous expliquer le mécanisme d’accès aux fonds, qui affirme-t-il,  sont effectivement disponibles, à ce jour.«  La chambre de commerce et d’industrie est au cour de la crise sanitaire que nous traversons. Donc sans soutien des autorités, c’est toute l’économie nationale qui coule. Dieu merci, le Président de la République a mis en place ces fonds qui pourront nous soulager et relever notre économie » s’est avant tout, réjoui le président Touré.Toutefois, pour bénéficier de cet important soutien, les entreprises doivent répondre à certains critères, explique Fama Touré.Ainsi,  pour une grande entreprise, il faut avant tout être une entité de droit ivoirien, effectivement implantée en Côte d’Ivoire.

Et se trouvant véritablement impactée par la covid-19, avec une perte réelle d’au moins 30% de son chiffre d’affaires. En outre, il faut avoir réalisé un chiffre d’affaires supérieur à 1 milliards F CFA, sur les 3 dernières années ( 2017, 2018 et 2019) ; être en activité et  à jour de ses déclarations fiscales et sociales au 31 janvier 2020.                         

Des entreprises déjà bénéficiaires Selon Fama Touré, avec la supervision d’un cabinet international d’experts, le ministère de l’Economie et des Finances a entamé la vérification des dossiers des entreprises. Aussi bien les grandes, les petites que les moyennes entreprises.Après des semaines d’enquêtes, le ministère du commerce et de l’industrie a remis des chèques à des responsables d’entreprises.

Le 18 mai dernier, ce sont 3 grandes entreprises ( Bernabé- CI, Tôles Ivoire SA et Manutention Climatisation Technique (MCT) qui ont reçu des chèques d’un montant total de 1, 132 milliards F CFA.Le président de la CCI-CI  dit avoir invité toutes les entreprises à se présenter au ministère de l’Economie et des Finances, avec tous leurs dossiers justifiant leur prise en compte effective.D’autres fonds en l’occurrence le fonds de soutien aux Pme ( FSPME) et le fonds d’appui au secteur informel ( FASI)  qui ont été mis en place fin mai, attendent les bénéficiaires qui auront fourni sous la supervision du ministère de l’Economie et des Finances, tous les documents nécessaires. 

S’il y a un secteur économique, visiblement éprouvé par cette pandémie, rien qu’au regard de l’arrêt de ses activités, c’est indubitablement, celui des transporteurs terrestres reliant Abidjan à l’intérieur du pays. En fait, tous autant qu’ils sont, se trouvent à différents degrés fortement secoués, par cette crise sanitaire.  Selon  Yacou Kouanda chef de gare de la société Sbta que nous avons joint au téléphone, les activités de la compagnie sont à l’arrêt total depuis le 29 mars 2020, du fait de la situation.  Elle n’assure donc plus la liaison entre Abidjan et les villes de Gagnoa, San Pedro, Soubré et le Burkina Faso. Les 300 travailleurs des différentes gares à savoir les conducteurs et les apprentis, sont au chômage. Et les 130 cars de la société sont immobilisés.

 Le comptable de la Sbta du nom de Privat,  également joint au téléphone, soutient que l’arrêt des activités occasionne d’importantes pertes financières, oscillant entre 50 et 80 millions Fcfa par mois.  Toutefois, il tient à souligner que la direction remet mensuellement à chacun de ces travailleurs, la somme de 60 000 Fcfa pour subvenir à leurs besoins. Tout comme SBTA, la compagnie ST, qui dessert, entre autres Man, Touba, Danané, Séguéla, Duékoué, et la localité de N’Nzérékoré en Guinée, paye également le prix fort de la pandémie.  Le directeur financier et administratif, Abdoulaye Soumahoro affirme que la compagnie est au point mort depuis fin mars 2020, car la majeur partie de ses activités, se passent entre Abidjan et l’intérieur du pays. La société  perd la  somme de 180 millions Fcfa par mois.  

Les pertes enregistrées au cours de ces trois derniers mois d’inactivités, sont évaluées à 540 millions Fcfa.  Conséquences, ses 140 employés sont au chômage.   Figurant au nombre des leaders du secteur, la compagnie UTB n’échappe pas aux impacts de la crise liée à la Covid 19.  A en croire son directeur d’exploitation, Williams Bla Kauphy,  elle perd 90 % de ses ressources financières et ne tourne qu’avec 10%.  800 des véhicules de la compagnie sont stationnés. En plus, près de 800 travailleurs de la société ont été mis au chômage technique à cause de la Covid 19. Les 10% des activités que UTB mènent à ce jour concernent la desserte des lignes telles que Bouaké- San-Pedro via Gagnoa et Soubré, Man- San Pedro via Duekoue  Issia Soubré. Il y a également les lignes Divo Bouaké et vice versa.  Une partie des recettes obtenues sur l’exploitation de ces lignes de l’intérieur, permet à la direction d’assurer 30% du salaire des agents en  chômage technique. 

 Sans vouloir donner un chiffre précis relatif aux pertes financières enregistrées par la société, le directeur d’exploitation tient à relever que le secteur du transport en général, selon une étude, a perdu  plus de 18 milliards Fcfa du fait de la Covid 19.                  

Des transporteurs attendent toujours Comme on peut le constater, ces différentes sociétés de transport, remplissent déjà l’un des critères d’éligibilités au fonds mis en place pour sauver les entreprises. Il s’agit de l’impact de la crise sur leur fonctionnement. Pour autant,  aucune n’en a jusqu’ici bénéficié. Du moins, au moment où nous les rencontrions, dans le cadre de cette enquête. Certaines ont pourtant fait les démarches que cela requiert. C’est précisément le cas de   UTB.

Aux dires de William Bla Kauphy, tous les dossiers afférents au prêt pour le compte de  sa  société,  ont été déposés. Mais jusqu’à la date du lundi 15 juin, la société n’a pas encore eu de retour. Ce responsable reste tout de même patient, estimant  que les dossiers à traiter à ce sujet sont nombreux. Le directeur administratif de ST et le comptable de SBTA, expliquent quant à eux, qu’ils ont engagé les mêmes démarches que UTB, en vue d’obtenir le prêt. Même s’ils s’attendaient à une subvention. Tout en saluant le geste de l’Etat concernant le fonds, le directeur administratif et financier de ST appelle de tous ses voux la réouverture des lignes d’Abidjan à destination de l’arrière pays. Car pour lui, « les transporteurs sont à bout de souffle ». Il rassure que les acteurs du transport procèderont au strict respect des mesures barrières si d’aventure l’Etat donne une suite favorable à cette requête.

 Si tel n’est pas le cas, la situation deviendra intenable à partir de fin juin 2020 selon ces responsables de  UTB et ST interrogés à ce sujet.

  Les hôteliers demandent un appui de 400 milliards de Fcfa   Les opérateurs  de l’industrie hôtelière eux, aspiraient déjà, bien avant  l’avènement de la crise sanitaire, à une aide plus importante, de la part des pouvoirs publics. Et dans le district d’Abidjan singulièrement, une fois la pandémie déclarée, le président de la CCI-CI, Faman Touré, avait conduit une visite des établissements hôteliers suivants : NSA Hôtel, Le Suprême, l’Etoile du Sud et le Wharf Hôtel, en vue de s’imprégner des difficultés qu’ils vivaient.Cela aura effectivement permis de faire le point sur : la situation générale des entreprises avant la crise de la covid19, (taux d’occupation – Chiffre d’affaires) ; l’état dans lequel elles se sont retrouvées pendant la crise : (cessation totale, fonctionnement partiel), les mesures prises pour la survie des activités.

L’estimation des pertes, leurs attentes vis à vis  de la Chambre de Commerce et d’Industrie et  de l’Etat. Ainsi que les propositions qui sont les leurs, pour la gestion de la crise.Ce fut l’occasion pour M. Ouattara Al Hassan, Président de l’Association des hôtels, restaurants et agents du tourisme (HOREST) et Porte-parole des entreprises hôtelières de Grand-Bassam, de présenter un tableau sombre des difficultés qui minent ladite filière. Il a fait état des différentes crises que Grand-Bassam a connues et qui ont frappé durement leur secteur, à savoir l’attentat terroriste, perpétré en 2013. Qui a créé une psychose et fait chuter le taux de fréquentation des hôtels ; les  inondations  enregistrées en 2019, qui ont entrainé de grosses pertes, avec en prime, une réduction considérable du volume de fréquentation des hôtels. Puis la covid19, qui est pratiquement venue administrer le coup fatal aux entreprises de ce secteur.«  C’est un cri de cour de la part des entreprises hôtelières » que leur porte-parole à adresser au président de la CCI-CI ainsi qu’au gouvernement. Auprès de qui, il sollicite la mise en place d’un véritable « plan Marshall », afin de relancer le secteur hôtelier, qui représente 7,5% du PIB. Par ailleurs, le Porte-parole des entreprises hôtelières de Grand-Bassam, que nous avons joint au téléphone, en a profité pour mettre les pieds dans le plat. Selon lui, le fonds de 100 milliards Fcfa pour toutes les PME et celles du secteur du tourisme et de l’hôtellerie est peu. Car, « si on devait aider rien que le tourisme avec 100 milliards Fcfa, ce serait difficile. Il faut au moins 400 milliards Fcfa pour notre secteur », fait observer Ouattara Al Hassan.

Qui par ailleurs dénonce  « des lourdeurs constatées dans le mode opératoire de soumission des dossiers en ligne, jusqu’à la distribution du fonds de soutien aux PME. ».Le Ministère du Tourisme et des Loisirs ayant pris la pleine mesure de l’urgence à voler au secours des entreprises hôtelières, entend exploiter une autre perspective plus spécifique à son département, au-delà du fonds général de soutien aux PME. 

 A en croire notre source bien introduite auprès dudit cabinet, au cours d’une réunion de partenariat public-privé, qui s’est tenue il y a deux jours, le ministre Siandou Fofana a déclaré que cela lui tenait à cour d’ériger spécifiquement un Fonds pour aider les entreprises du secteur du tourisme et de l’hôtellerie à ne pas mettre la clef sous le paillasson.   Ainsi qu’on peut l’imaginer aisément, du fait de sa relative fragilité, le secteur informel aussi ne manque pas de faire les frais de cette pandémie.

Ses acteurs sont  aux abois. C’est donc à juste titre si le plan de riposte économique concocté par les pouvoirs publics  les prend en compte.« Depuis le début de la crise sanitaire, notre activité tourne au ralenti. Avant la Covid-19, ça marchait bien. On pouvait recevoir 50 à 60 clients par jour. Mais aujourd’hui, nous recevons à peine 20 personnes. Vraiment, ce n’est  pas du tout facile», nous fait savoir Kouamé Elodie, gérante d’une agence de transfert d’argent à Yopougon Maroc. «  Les choses me marchent pas.

On essaie de tenir bon pour pouvoir payer le magasin. Et ce qui nous peine le plus, c’est qu’on n’arrive même  pas à  payer correctement nos employés qui sont des pères et mères de familles. Sans oublier que nous devons payer les taxes et impôts. On a vraiment besoin d’un appui », soutient Ali Fayed, patron d’une  boutique d’articles divers, située à Marcory ramblais. 600 millions de Fcfa distribués aux acteurs de l’informel Pourtant, selon le porte- parole du gouvernement Sidi Touré,  ce sont environ 2279 acteurs du secteur informel à l’échelle nationale, intervenant dans les secteurs  du commerce, de l’artisanat, du transport et de la restauration, qui ont bénéficié de la subvention du Fonds d’appui au secteur informel (FASI), qui s’élevait à 531,55 millions de francs CFA au 31 mai 2020.

Ce sont 600 millions de francs CFA sur les 20 milliards disponibles en ce moment, qui ont été distribués à ce jour aux acteurs du secteur informel  Le Fonds d’appui destiné aux acteurs,  sera répartit en deux phases: la phase de subvention comprise entre 200 et 300 mille Fcfa et la phase d’octroi de prêts qui va de 300 mille à 2 millions de Fcfa.Selon le Secrétaire exécutif du Fasi Herman Nicoué, 40. 000 personnes vont bénéficier de ce fonds sous forme de subvention pendant la phase transitoire allant du 14 mai  au 15 juin 2020. Soulignant que le montant total alloué à ce programme est de 100 milliards de francs CFA.                                  Autant d’interrogations sans réponses  200 millions de FCFA, c’est le  »fonds spécial Covid-19 »  destiné  aux entreprises privées et faîtières du secteur des médias de Côte d’Ivoire, en vue de faire face à la pandémie. Qui sont les bénéficiaires de ce fonds spécial, annoncé par  le ministère de la Communication ?  Le mode opératoire  prévu pour son décaissement a-t-il été défini ? Le conseil de gestion du Fonds de soutien et de développement de la presse (FSDP) qui devrait  valider le montant sous forme d’un « soutien direct en trésorerie » , l’a-t-il fait ?  La nouvelle a été  donnée par Sidi Tiémoko Touré, Ministre ivoirien de la Communication et des Médias, jeudi 23 avril 2020, à son cabinet au plateau. Le ministre avait déclaré la validation de 200 millions sous forme d’un  »Soutien direct en trésorerie » pour soutenir l’univers de la presse et des médias ivoiriens.

Pour en savoir plus  sur la définition des critères d’obtention  et de décaissement   du montant promis à la presse,  nous avons eu pour destination  le Fonds de Soutien et de Développement  de le Presse (FSDP). L’institution  a été commise pour élaborer un mode opératoire du fonds annoncé. Contactée, Bernise N’Guesssan , directrice en charge de la trésorerie du FSDP était sur le qui-vive. «Vous voulez savoir ce qu’on a fait des 200 millions c’est ça ? Ce n’est pas le FSDP qui a fait l’annonce,  c’est  le   ministre qui l’a fait. Vous avez certainement le numéro du ministre, appelez-le, il vous dira où sont passés les 200 millions. Vous pouvez nous écrire sur notre site pour toutes vos questions», nous a-t-elle répondu.11 entreprises, dont des organes de presses en ligne et de presse imprimées visitées par notre équipe, ont leurs directeurs de publication qui reconnaissent avoir reçu des dons en  matériel ( Gel hydro-alcoolique, des seaux à robinet, des masques) dans le cadre de la prévention de la pandémie. Ces derniers  ont  affirmé  n’avoir par contre rien reçu  émanant du  » Fonds  spécial covid-19 ». «Pour l’instant notre  part des 200 millions n’a pas encore  été virée.», a confirmé un directeur de publication de la presse en ligne.Le directeur de publication d’un organe  de presse imprimé, joint par téléphone  d’ajouter, «nous n’avons rien reçu des 200 millions. Et à ma connaissance  personne n’a reçu quoi que ce soit de ce montant.

Je sais que la question est gérée par le ministère, je n’en sais pas plus. C’est eux qui suivent l’affaire. On ne sait pas comment ce  sera payé. Nous suivons l’affaire», a attesté une deuxième confirmation.  A la maison de la presse, des confrères nous ont précisé que  le fonds en question était selon un communiqué signé du président des syndicats des entreprises privé de la presse, exclusivement réservé aux organisations professionnelles de la  presse. 

 Après la publication dudit courrier, de nombreux journalistes apprendront plus tard, que  le fonds en question est destiné aux entreprises de presse. Ce qui conférait  dorénavant sa gestion au Groupement des Entreprises de Presse de Côte d’Ivoire (GEPCI).Un membre d’un organe de presse déclare : «moi, je n’ai  vraiment rien reçu. Pour l’instant il n’y a pas de transparence,  aucune communication sur cette  affaire pour nous dire comment cet argent sera partagé. Je veux parler du mode opératoire», s’est-il indigné.  Sur un total de 1700  milliards de franc prévus pour un plan de Soutien Economique, Social et Humanitaire, l’univers de la presse attend seulement 200 millions de FCFA. Ce montant semble-t-il, reste encore à l’état projet

.Ibrahim S KonéJérémy

JuniorJob Attéméné

 Aboubacar BarryOyhou Antoine