Eric Dupuy, porte-parole de la coalition de cinq partis d’opposition Cap 2015 – une des organisatrices des manifestations de mercredi et jeudi qui réclamaient une alternance politique – a qualifié cette réforme de « dilatoire ». « Nous n’attendons rien de cela », a-t-il répété.
Le président du Togo, Faure Gnassingbé, a pris le pouvoir il y a 12 ans à la mort de son père, Gnassingbé Eyadéma. Le général Eyadéma avait lui même dirigé le petit pays ouest-africain pendant près de 40 ans après un coup d’Etat militaire.
L’opposition togolaise réclame depuis dix ans que la Constitution – modifiée en 2002 – soit révisée, notamment afin d’y réintroduire une limitation des mandats (10 ans au plus).
Dans un communiqué publié à la suite du Conseil des ministres mardi soir, le gouvernement avait joué l’apaisement en annonçant des réformes constitutionnelles concernant la « limitation des mandats et le mode de scrutin ».
Toutefois, la limitation à deux mandats présidentiels ne se fera pas de manière rétroactive, selon le projet de loi.
Le président Gnassingbé a officiellement remporté les élections présidentielles de 2005, 2010 et 2015, mais l’opposition n’a pas accepté ces résultats.
Les Nations unies ont appelé l’opposition togolaise à travailler avec le gouvernement. Elle semble toutefois dubitative face aux promesses du pouvoir. « Nous n’avons pas encore connaissance du texte du projet de loi. A ce stade il nous est difficile d’en parler », a affirmé M. Dupuy.
Mercredi et jeudi, les Togolais ont manifesté massivement à Lomé et dans une moindre mesure en province à l’appel d’une coalition de 14 partis, pour réclamer des réformes et le départ du président Faure Gnassingbé.
« C’est une mobilisation populaire sans précédent depuis des années, qui touche pour la première fois presque toutes les villes secondaires du pays, ça c’est vraiment nouveau », a déclaré à l’AFP Gilles Yabi, analyste politique spécialiste de l’Afrique de l’Ouest.
« Il est difficile de savoir si la mobilisation actuelle va aboutir à un changement politique », relativise cependant M. Yabi. « Le gouvernement a toujours su créer des commissions et des instances de dialogue mais rien n’a jamais abouti », déplore-t-il.
Pour l’analyste, le président togolais « n’est pas prêt à renoncer au pouvoir ». « Le régime actuel s’inscrit dans la continuité de celui du père, qui fut l’un des plus brutaux que le continent africain ait connu », a-t-il estimé.
Au moins 80 personnes avaient été interpellées à Lomé suite à ces manifestations. Dimanche, Eric Dupuy a expliqué que des groupes de défense des droits de l’Homme lui avaient assuré que tous les détenus avaient été relâchés dans la nuit de samedi à dimanche, ce qui n’a pas encore été confirmé par les autorités.
Le parlement togolais doit se réunir mardi pour une session extraordinaire. Le ministre togolais de la Fonction publique, Gilbert Bawara, a toutefois indiqué vendredi qu’il n’était pas certain que les parlementaires, qui devaient normalement rentrer en octobre, auraient le temps de débattre de la réforme en un jour.
AFP